Chronique de Rik Torfs publiée dans le soir du 26 mars
Un samedi à Paternoster, province du Cap Occidental, Afrique du Sud. Le soleil brille. Le propriétaire de la maison où je loge regarde un match de cricket à la télévision. Le beau temps ne l’invite pas à sortir. Il ne faut pas toujours profiter du beau temps quand il fait toujours beau. Comme on peut se permettre de ne pas profiter de son argent quand on en a trop.
La vie est lente. Lorsqu’elle est lente, elle semble innocente. C’est vrai en plus, mais pas toujours. L’Afrique du Sud se trouve devant les élections du 22 avril. Ici, les élections comptent encore. Certes, le mépris et l’indifférence pour le monde politique, si répandus en Belgique, et en Flandre plus qu’ailleurs, gagnent du terrain, même au pays où la liberté pour tout le monde a fait l’objet d’une longue lutte sans répit. Cependant, les journaux offrent des analyses politiques en profondeur.
L’impression générale est que l’ANC, le parti légendaire dont Nelson Mandela a été le dirigeant le plus noble et le plus brillant, est à bout de souffle. Il perdra sans doute sa majorité des deux tiers. Et certains observateurs espèrent même une défaite davantage cinglante encore. L’usure du pouvoir, la corruption et l’incompétence des mandataires font que, après quinze ans de gouvernement, les libérateurs d’antan ne sont guère les prophètes d’aujourd’hui. Voilà sans doute le sort des révolutions réussies. Elles conduisent au conservatisme, qui au fur et à mesure ne plaira plus à personne. Parfois, le conservatisme protège des privilèges injustes. Parfois il est d’un niveau moral bien élevé, mais il ennuie. Dans les deux cas, il disparaîtra. Un jour. Mais quand ? Les partis politiques ayant joué un rôle historique ne devraient pas quitter le pouvoir trop tôt, ce qui arrive rarement. Ils ne devraient pas non plus rester trop longtemps, un phénomène qui est pourtant beaucoup moins exceptionnel.
Comment partir en héros? Celui qui se pose cette question n’est sans doute pas parti à temps lui-même, car il se préoccupe davantage de sa propre réputation que du bien-être du pays. Ainsi, pour l’ANC, la gloire a fait place au pouvoir pur et simple, exercé avec prudence et compétence par moments, mais en nette perte de vitesse aujourd’hui. Ne reprochons rien aux Sud-Africains. Apprécions plutôt leur esprit d’analyse.
Un petit détail pour conclure. Parmi les partis politiques mineurs, un seul pourrait être directement importé de la Belgique. Le Cape Party plaide pour l’indépendance des provinces du Cap, avec leurs territoire, culture et langue spécifiques. Le dépliant du parti donne des précisions. 42 % des taxes sont destinées à d’autres provinces du pays. Ah, les transferts ! Les riches qui craignent de devenir pauvres. Et les pauvres qui le seront à jamais.
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